Mercier : de la tradition familiale à l’engagement international pour un cacao durable

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Mercier : de la tradition familiale à l’engagement international pour un cacao durable

Daniel Mercier devant la boutique emblématique de Bourges

Fondée en 1912, la Maison Mercier est bien plus qu’une simple biscuiterie-chocolaterie. Aujourd’hui, avec 90 collaborateurs, 5 boutiques en France et des projets d’implantation à l’international, l’entreprise continue de grandir tout en restant fidèle à ses valeurs. Entre savoir-faire artisanal et engagement social, Mercier transforme chaque jour les codes du chocolat en alliant innovation, tradition et solidarité. Son aventure va bien au-delà des frontières, avec des projets de soutien aux jeunes planteurs de cacao en Afrique et en Amérique latine.

Une histoire de famille depuis 1912

L’aventure Mercier débute en 1912 à Baugy (18), avec Marcel Mercier, boulanger-pâtissier. Marcel innove en lançant des biscuits aux saveurs locales, comme la fameuse croustade au crottin de Chavignol ou encore des Croquets du Berry.

Quant au chocolat, « il en faisait un peu », se souvient Daniel Mercier son petit-fils. « À l’époque on parlait surtout de tablettes de chocolat à croquer. Ma mère en glissait d’ailleurs dans ma valise pour l’internat à Bourges ! »

En 1958, Pierre le fils de Marcel reprend les rênes de l’entreprise familiale en y ajoutant de nouvelles recettes. Pâtissier-chocolatier de formation, Pierre développe l’offre tout en perpétuant les traditions.

Trois générations plus tard soit en 1984, Daniel reprend le flambeau de son père, bien que son chemin semblait destiné à une toute autre direction !

L’expansion de Mercier

Daniel, issu d’une fratrie de 6 enfants, n’était pas initialement destiné à rejoindre l’entreprise familiale. « Il faut dire qu’en étant fils d’un pâtissier, dans un village de 1000 habitants, quand vous êtes gamin vous aidez les parents après l’école et le week-end. Passionné par la nature, je me voyais plutôt faire carrière dans les eaux et forêts. »

Finalement, contre toute attente Daniel intègre la biscuiterie familiale et apporte un vent de nouveautés. Il élargit la portée de l’entreprise en vendant ses produits au-delà de la région.

Face à la demande croissante, l’ancienne coopérative agricole de Baugy est rachetée en 1988. Elle devient le premier site de production de biscuits de la marque Mercier, avec entre autres, des biscuits nappés de chocolat.

Au début des années 1990, Mercier se lance en sus des biscuits dans la fabrication de chocolats. Daniel reprend une formation de chocolatier-pâtissier pour acquérir un niveau d’excellence. « Je ne voulais pas me contenter d’être moyen ou médiocre. Quitte à faire un métier autant y exceller. »

L’année 2000 marque un tournant avec la construction d’une nouvelle usine pour soutenir la croissance toujours soutenue. Cinq ans plus tard, Mercier est à l’étroit dans ses locaux. Aussi Daniel rachète l’ancienne usine G. Pasquier (brioches) à Baugy, renforçant ainsi la capacité de production avec un site de 5800 m2.

Aujourd’hui, deux de ses quatre enfants, Julien et Pauline, sont investis dans l’entreprise familiale, incarnant ainsi la quatrième génération à prendre part à cette belle aventure.

Une expansion à 360°

L’expansion de Mercier ne se limite pas au cacao. En effet, afin de proposer une offre complète dans ses boutiques, l’entreprise a racheté dans les années 2000 un confiturier et un glacier. Daniel Mercier a également décidé de sauver la Chocolaterie Royale à Orléans, la plus ancienne chocolaterie de France (créée en 1760), qui était sur le point de disparaître. La gamme de produits Mercier s’enrichit alors de succulents pralinés, ganaches fraîches et macarons « maison ».

Ces acquisitions successives ont permis à Mercier de maîtriser entièrement la production de desserts haut de gamme. Cette diversification renforce la position de l’entreprise comme acteur incontournable des douceurs artisanales, en proposant tout sous un même toit.

Il suffit d’ailleurs de pousser la porte d’un lieu emblématique acquis en 2005 pour apprécier les larges gammes. La boutique « Arôme du vieux Bourges », 11 place Gordaine à Bourges fait office de « navire amiral » indique Daniel Mercier.

La vitrine habillée de ses macarons et autres douceurs sucrées impose de s’y arrêter et surtout à pousser la porte ! Plus ancienne épicerie fine (depuis 1979), cette maison classée aux Monuments Historiques en 1914 est une occasion de découvrir les gammes à s’offrir ou à offrir.

Le pari de l’export et des plantations de cacao

Tout a commencé en 2005 avec une ambition simple mais audacieuse : développer une plantation de cacao au Mexique, là où ce trésor millénaire est né. L’œil de Daniel brille rien qu’à évoquer le trésor cacao et l’histoire des Mayas ! C’est ainsi que des terres ont été achetées par Mercier et une nouvelle histoire était prête à s’écrire.

En 2017, « lorsque Julien, mon fils rejoint l’entreprise familiale une prise de conscience s’impose » glisse Daniel. « On a nos plantations, mais comment aider les autres producteurs de cacao ? »

« La situation mondiale du cacao est alarmante. La moyenne d’âge des planteurs est autour de 65 ans, ils cultivent des parcelles de moins d’un hectare et récoltent à peine 300 kg de cacao par hectare. La pauvreté sévit dans ces communautés et le spectre d’une pénurie mondiale de cacao se profile. 99% des producteurs de chocolat n’ont jamais mangé de chocolat et a contrario 99% des chocolatiers ne sont jamais allés sur une plantation de cacao » glisse Daniel.

En quête de solutions, Daniel élu à la Confédération des Chocolatiers et Confiseurs de France (CCCF), se rend avec d’autres collègues au Cameroun en 2017. Là-bas, il rencontre des planteurs de cacao qui, pour beaucoup, n’avaient jamais goûté de chocolat ! Il découvre sur place un programme gouvernemental baptisé « New Generation ». Ce projet révolutionnaire vise à former les jeunes planteurs pour qu’ils puissent cultiver un cacao de qualité.

Impressionnés par l’initiative, Daniel et d’autres chocolatiers décident de s’y associer en créant le mouvement des Chocolatiers Engagés au sein de leur Confédération. « L’objectif était de sensibiliser les artisans aux enjeux économiques et socio-environnementaux de la filière cacao et de leur apporter une certaine transparence en créant des filières d’approvisionnement en circuit-court avec des coopératives camerounaises » explique le chocolatier. Ils achètent donc directement la production de ces jeunes, contournant les grands marchés mondiaux et réduisant de six le nombre d’intermédiaires. Les jeunes planteurs sont formés pendant 3 ans, équipés (fourniture de plants, intrants, bottes etc.) et encadrés pendant leur formation pour développer des cacaoyères durables. Aucun argent n’est versé aux jeunes mais du matériel leur est intégralement fourni. « Grâce à cette initiative, 1700 familles ont déjà vu leur quotidien transformé. On a travaillé avec eux sur leur prix de revient. On a changé la vie des gens » s’émeut Daniel.
Le programme est passé de 42 jeunes formés au lancement en 2017 à plus de 2500 formés en 2024 ! Et avec 2000 jeunes actuellement sur liste d’attente et 7 coopératives créées l’aventure est une vraie success story.

En 2021, après trois années de développement et consolidation du projet Chocolatiers Engagés au Cameroun, la Confédération des Chocolatiers et Confiseurs de France a décidé de créer une association indépendante (loi 1901) pour mener à bien le développement de Chocolatiers Engagés à travers le monde. L’association compte aujourd’hui plus de 100 adhérents, tous artisans chocolatiers et confiseurs francophones passionnés. Cette initiative prend désormais une dynamique européenne avec des partenaires belges et suisses.

Le documentaire emblématique « Cacao et Chocolat : le goût du partage »

L’engagement de Daniel Mercier et de ses confrères pour un cacao durable et éthique a fait l’objet d’un documentaire réalisé par Laurent Sarcelle, intitulé « Cacao et Chocolat : le goût du partage ».

Diffusé en septembre 2024 sur France Télévisions et au Sénat, ce film met en lumière le travail réalisé par l’association Chocolatiers Engagés et la mission de Daniel au Cameroun.

À travers ce documentaire, on découvre les actions concrètes menées sur le terrain pour soutenir les jeunes planteurs et transformer l’avenir du cacao, tout en maintenant un lien de partage et de solidarité entre producteurs et chocolatiers. Des témoignages émouvants sur l’accompagnement apporté par les Chocolatiers Engagés, sur les changements des conditions de vie des planteurs de cacao sont le fil rouge de ce documentaire. Plus globalement le spectateur est amené à découvrir qu’en assurant un prix équitable aux producteurs de cacao et en adoptant des pratiques durables, c’est toute la filière cacao qui se développe sans sacrifier l’environnement ou la qualité pour un chocolat d’exception.

Omer Maledy qui travaille depuis 2012 au Cameroun sur le projet New Generation à la renaissance de la filière cacao avec le soutien des Chocolatiers Engagés évoque avec tendresse sa rencontre avec eux : « Quand les chocolatiers comme Daniel sont arrivés au Cameroun en 2017 ce n’étaient pas des parisiens. Ils venaient de villages comme Baugy. Des villageois producteurs de cacao rencontraient des villageois producteurs de chocolat. C’était providentiel ! »

Malgré cette expansion internationale, Mercier reste profondément attaché à ses racines. Adhérent au réseau © du Centre, l’entreprise valorise le patrimoine régional du Centre-Val de Loire et s’engage à faire connaître cette région. Pour Daniel Mercier, l’ancrage local est aussi important que l’ouverture au monde : « Nous sommes des acteurs économiques régionaux et il est crucial de promouvoir notre territoire. »

Aujourd’hui, avec 90 collaborateurs et 5 boutiques en France, Mercier continue de croître tout en restant fidèle à ses valeurs. L’entreprise a des projets d’implantation à l’étranger dès 2025 et s’efforce de préserver à la fois le patrimoine familial et la durabilité à travers ses initiatives locales et internationales.

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